« Rêves croisés » : un voyage tant physique qu’intérieur
A travers cette nouvelle, j’ai voulu évoquer tant le voyage physique, que le cheminement intérieur de ceux qui sont partis loin de chez eux, mais aussi de ceux qui s’apprêtent à partir. De part et d’autres, des « Rêves croisés.
De quoi parle cette nouvelle ?
« Une ville africaine, de nos jours. Une, jeune femme se prépare à voyager. Plus, loin, à des milliers de kilomètres, un homme attend. Entre eux, un lien qui se révèle progressivement. Dans Rêves croisés, le voyage est aussi bien physique qu’intérieur. »
Je vous partageais déjà ici un extrait de « Rêves croisés ». Dans un futur article, je reviendrai sur cette nouvelle, pour vous parler de ça genèse et aussi d’une partie du processus qui me conduit à privilégier telle ou telle histoire.
Yaoundé, un mois d’août. Quartier Olezoa. Une petite foule patiente devant un bâtiment blanc niché au milieu de manguiers centenaires. Debout près de la barrière en fer forgé, un vigile affiche ostensiblement une mine ennuyée. Soudain, mû par un signal connu de lui seul, l’homme ouvre le portail.
Instantanément, un rang se forme devant celui-ci. Là, dans l’amas de gens aux visages crispés par des sourires qui sonnent faux, une jeune femme se tient droite. Arrivée parmi les premiers, elle a eu tout son saoul pour observer à la dérobée. Un soupir, une main qui caresse machinalement un sac, une silhouette qui s’affaisse, leur inquiétude suinte à travers chacun de leurs gestes. Ils ne se parlent pas. Comme s’ils craignaient en entrouvrant leurs lèvres, d’être happés par le monde extérieur. Tout à leurs rêves, ils ont trouvé refuge dans le silence. Dans quelques minutes, leur vie va basculer. Espoir ou déception ?
Depuis des heures que durent leur attente, ils s’observent furtivement. Deux regards qui se rencontrent et vite, se réfugier derrière le voile du détachement pour que l’autre ne devine pas la peur née de l’incertitude, la peur qui noue le ventre. Indifférents au soleil de plomb, ils avancent au rythme du rang, priant en silence pour obtenir l’objet qui cristallise toutes leurs pensées : le visa. Avec lui, ils pourront prétendre à un futur différent. Partir ! Ils le veulent tous, du quadragénaire en veste prince-de-galles en passant par le jeune adolescent en jeans et baskets ou elle, vingt-un ans.
C’est son tour. Elle avance, s’arrête, sourit timidement. L’employée au guichet, une Blanche entre deux âges, mine renfrognée sur des lèvres pincées, ne répond pas à son sourire. Deux heures plus tard, elle se dépêche de sortir de ces lieux pour savourer en famille l’heureuse nouvelle : son rêve va devenir vie ! Bientôt, elle va s’élever au-dessus des nuages, bercée par le scintillement des étoiles. Elle va voyager, partir, le retrouver…
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